Rechercher dans ce blog

mardi 6 septembre 2016

Chris Ware est jaune pétale

Le huitième numéro de la revue Pré Carré (critique et théorie de la bande dessinée) vient de sortir, savamment corollé dans son jaune tournesol. Un long discours valant mieux qu'un long discours, en voici donc le texte de présentation : 

Nous désirions depuis le premier numéro de Pré Carré écrire sur Ware, mais nous repoussions sans cesse le moment d'aborder ce qui ne pourrait être qu'un un travail colossal et épineux : écrire sur Ware, c'est à la fois éviter de le circonscrire dans une marotte théorique en passant à côté de sa profonde hétérogénéité voire de ses contradictions, et c'est écrire également sur ces écritures-mêmes qui le consacrent depuis tant d'années dans une impuissance assez étonnante à se mettre à la hauteur de leur objet ; lectures systémiques, affectives, dramaturgiques ou biographisantes, toutes monadisant Ware par leurs formes dévotes et peu imaginatives. Ne pas venir grossir inutilement le tas de pages infécondes consacrées à Ware, voilà ce qui, jusqu'au texte de Oolong publié dans le numéro 7, paralysait cette entreprise et en repoussait la mise en branle de numéro en numéro.



Par ailleurs, Pré Carré n'avait pas été conçu par nous pour produire des archipels de textes et d'écriture isolés, mais bien pour tenter d'inventer des formes communes, des protocoles de travail collectifs, pour nous contaminer les uns les autres intellectuellement, poétiquement, théoriquement, éthiquement. Si indéniablement le train opiniâtre de la revue a produit ces effets dans nos textes respectifs, nous n'avons pas jusqu'ici réussi à quitter les niches douillettes des taches réparties dans l'écriture solitaire.
C'est la décision de prendre le texte de Oolong pour en faire la nervure centrale d'un travail commun qui nous a conduit à chercher un outil d'écriture collectif en ligne, sur lequel, pas à pas, nous allions broder ce numéro 8. Voici comment le courrier aux rédacteurs fut adressé :
« ce texte sera la matrice d'un travail commun, un premier trajet à travers une oeuvre foisonnante, qui ne demande qu'à être déplié à son tour ; l'idée est de placer ce texte au milieu de nous, dans un dispositif technique en ligne simple et mutualisé auquel nous pourrons tous avoir accès simultanément, et de nous inviter à tirer sur les fils de sa trame pour broder des motifs nouveaux sur les objets wariens qui nous intéressent le plus. De la simple notule qui pourra devenir une sorte d'excroissance collée au texte original (il sera désossé tout au long de ce numéro, composition talmudique entourée de ses commentaires, colonne synoptique en face de son paratexte etc.) à la longue paperole qui ouvrira un texte second, nous pourrons pas à pas envahir le numéro 8 intégralement consacré à Ware sous toutes ses coutures, jusque dans ses rubriques annexes - Palimpseste, Lieu commun, Moins la main, etc.» ; nous étendîmes la variété du commentaire au loisir d'écrire au fur et à mesure sur ce que nous nous donnions mutuellement à lire, produisant autant de paratextes qu'il nous semblerait nécessaire pour donner à un travail théorique et critique sur Ware un cadre aussi généreux et expérimental que celui qu'il offre à ses lecteurs depuis plus de vingt cinq ans.

Je vous renvoie à la page de présentation de ce numéro, pour y trouver photos, sommaire, extrait d'une dizaine de pages à télécharger au format pdf, et surtout le petit bouton paypal pour commander ce copieux numéro (plus fourni que les précédents, il coûte cette fois 8 euros, plus frais de port de 2,70 euros). Précipitez-vous : l'oeuvre de Ware étant encombrée de commentaires au choix niaisards, sentimentaux, fétichistes, sémiotiques ou enamourés, ce serait dommage de passer à côté de cette bien belle machine théorique et critique, polyphonique comme du Gesualdo et constellative comme un vitrail.

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire